13 by Chris ANDSON

Auteur:Chris ANDSON [Chris ANDSON]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Feedbooks
Publié: 2014-01-20T05:00:00+00:00

Ils allèrent lentement vers l’opacité, lieu de toutes les peurs, tout en suivant le chien dont la queue frétillait. C’était plus fort qu’eux. Un lien les unissait, celui de l’angoisse. Le froid et l’inquiétude, devenaient secondaires pour le commissaire, quand un appel à ses sens de policier retord se faisait entendre. Là, quelque part, quelqu’un perdait son sang, sa sève vitale. Une bête blessée surement. Mais il voulait en être sur, en avoir le cœur net, c’était son devoir. Ils s’enfoncèrent progressivement dans la forêt.

Tout d’abord, Jochen chercha les traces au sol pour refaire le trajet du chien. La lune qui par instant sortait un croissant le retirait bien vite dans un cache-cache cruel. Une neige fine recouvrait systématiquement toutes marques. Celles d’Arthur étant quand même plus profondes, il les repéra. Il prit la piste, suivi du poète. Les branches d’arbres, totalement recouvertes de givre barraient par instant le passage. Il en cassa une ou deux, puis sortit du chemin et alla au hasard, suivant le chien qui reprenait le pas, truffe à terre. Ils marchèrent un bon quart d’heure, en faisant bien des détours pour rester au plus près du marquage. Les taillis enneigés ressemblaient à d’autres et l’on évaluait mal les distances. Si bien qu’ils finirent par ne plus se reconnaitre. Mais le chien reniflait toujours le sang chaud et tenait le pied.

Soudain, après s’être baissé pour sortir d’une ornière, Jochen tomba enfin, sur ce qui l’avait instinctivement conduit jusque là. Un corps mutilé, abandonné, gisant au sol. La vision donnait à frémir tant elle était lugubre. La lune jaillissant des nuages, éclaira d’une lumière crue et blanchâtre la victime.

- Bon sang, c’est quoi ça ? Murmura de Nerval.

- N’avancez pas ! ordonna le commissaire déjà en action. Regarder, il y a des traces de pas au sol. Deux personnes surement.

- Cette vision est fantasmagorique, lâcha le poète, mais tellement féconde. Le sacrifice suprême !

La main sur le cœur il déclama ses propres vers.

Immobile Destin, muette sentinelle

Froide nécessité :… Hasard qui t’avançant

parmi les mondes morts sous la neige éternelle

Refroidis par degré l’univers pâlissant

Jochen soupira devant le sort qui s’acharnait sur lui. Non seulement il avait un crime sous les yeux, mais un fou à ses côtés.

- C’est suffisamment effrayant comme cela. N’en rajoutez pas Gérard.

- Je me régale, dit l’autre. Tout y est : la neige, le sang, le déchainement de la cruauté, la peur sur son visage. Vous avez vu se visage commissaire comme il est effrayant !

- Fermez là.

Jochen évita de piétiner la scène de crime. Car c’en était un. Une jeune femme égorgée, vidée de son sang, baignait dans une mare qui avec le froid s’était coagulée. Elle devait avoir dans les vingt cinq ans et portait l’uniforme noir à col blanc du personnel du château. Son visage pareil a un masque de cire, paraissait tourmenté. Ses cheveux savamment regroupés ornaient sa tête en auréole.

- Elle a été joliment apprêtée, dit tout haut de Nerval. Un crime rituel peut-être.

- Une mise en scène plutôt.

Jochen subjugué demeurait silencieux.

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